24 février 2008

Pourquoi je n'ai pas aimé Paris ?

J'ai fermé mon blog ciné mais, parfois, il y a des films qui méritent une petite note sur mon blog. C'est le cas de Paris, le dernier film de Cédric Klapisch. Autour de moi, dès que j'ose dire que j'ai été terriblement déçu par le dernier Klapisch, j'entends un brouhaha confus et insultant ne comprenant pas comment j'ai pu passer à côté d'un tel chef d'oeuvre. J'attendais beaucoup de ce film. La bande-annonce, aussi bien que le battage médiatique qui a précédé sa sortie, ont fait monter l'excitation. Le synopsis semblait séduisant. J'en étais arrivé à compter les jours me séparant de sa sortie officielle. Mercredi, dès la fin des cours, je me ruais au cinéma pour assister à la projection. Et la claque fut sévère, la déception terrible ; je maintiens que le film est superficiel et manque cruellement d'imagination et d'émotion. Klapisch s'est laissé prendre à son propre jeu, on ne peut pas faire une oeuvre avec rien; tout le monde n'est pas Beckett !

Pour moi, le film est indigne d'un Klapisch. C'est un réalisateur que j'aime beaucoup, dont je crois d'ailleurs avoir vu tous les films. Mais ici, on retrouve plutôt la marque d'un mauvais Lelouch que l'humour corrosif d'Un air de famille, la légèreté et la fraîcheur de l'Auberge Espagnole ou encore l'originalité de Peut-être. En plus, le montage manque de subtilité. Rarement vu des transitions aussi lourdes, aussi convenues, aussi rébarbatives. Les ficelles du film sont tellement grosses que cela devient désespérant. Le film cahote péniblement et peine à masquer son absence totale de scénario. Aucune réplique marquante, aucun dialogue passionnant, aucune histoire ne sort du lot. Le film est un enchevêtrement de banalités. Et je peine à croire que quelqu'un prenne du plaisir à payer 10 euros pour voir dans une salle obscure ce qu'il pourrait voir en s'asseyant deux heures à la terrasse d'un café. Tout n'est que clichés sans consistance. A vouloir au maximum déconstruire les clichés du genre, Klapisch parvient à l'effet contraire. Ni militant, ni provocateur, le film est juste commercial, suffisamment universel et consensuel pour se tailler un joli succès populaire.

J'ai également eu du mal à me faire à la philosophie du film, son côté moralisateur très gauche caviar m'a agacé, sa réflexion vaguement métaphysique sur la vie, la mort, l'amour a des relents de déjà-vu. Quelle absurdité que les passages ridicules dans le secteur social, sur l'immigration africaine et, pire que tout, sur les maraîchers de Rungis. Aucune conscience sociale et aucune épaisseur psychologique (faute de temps ou de moyens mis en œuvre ?), le film se perd dans un discours trop grand pour lui. J'aime Paris, j'aime ma ville, je me sens parisien, je suis parisien. J'aime tous les quartiers de Paris, le Quartier Latin aussi bien que les quartiers populaires (même si je reconnais aisément que je hais les VII, VIII et XVIème arrondissements) et je n'ai pas besoin de Klapisch pour m'y plaire et en profiter. Et son film, faussement bobo, situe son intrigue dans un Paris de carte postale. Romain Duris vit à Gambetta, François Cluzet face à la BNF, n'est-ce pas exactement les deux coins de la capitale en vogue ces dernières années ? Mélanie Laurent et Fabrice Luchini passent leurs journées autour de la Sorbonne, n'est-ce pas le lieu emblématique de la vie étudiante rêvée ? C'est sûr que ça fait nettement moins envie de tourner à Nanterre ou à Saint-Denis. Et le rendez-vous romantique à Montmartre vient conclure un ramassis de lieux communs franchement déplaisants, mis bout à bout pour séduire le provincial casanier ou l'étudiante étrangère voulant faire son Erasmus en France. Cédric Klapisch et moi habitons le même Paris mais nous n'en tirons pas les mêmes conclusions.

Heureusement, le film est sauvé par ses acteurs. Rarement Juliette Binoche n'aura été aussi belle, rayonnante, incandescente et autour d'elle, les acteurs peuvent être touchants (Romain Duris ou Albert Dupontel), énervants (Fabrice Luchini ou Gilles Lellouche), séduisants (Mélanie Laurent), drôles (Karin Viard ou Julie Ferrier) et surtout toujours justes ! Le film est certes plaisant mais il est surtout futile, paresseux, brouillon et insignifiant; une erreur j'espère dans la filmographie de Cédric Klapisch.

Dommage !

9 commentaires:

AP a dit…

Je n'avais pas prévu d'y aller car je n'attends rien de ce type de cinéma, définitivement !
Amazone

ombres et lumière a dit…

Du coup je m'interroge; Y vais, y vais pas ?
Je me faisais dans ma tête un peu l'idée d'une équivalence de "DANS PARIS" mais visiblement ce n'est pas ça du tout.

Antoine a dit…

Non non, vraiment aucun rapport si ce n'est la prestation de dépressif au bord de l'agonie de Romain Duris...

electricbreeze a dit…

Je suis assez d'accord avec cet article, par ailleurs le film m'a vmt rappelé "Dans Paris", tournant autour de la mort et de la dépression à certains moments. Le plus glauque des Klapish, définitivement!

Antoine a dit…

Je ne trouve pas que le mot glauque soit particulièrement bien choisi. "Paris", comme "Dans Paris", restent des films incroyablement légers, voire drôles, malgré la mort qui est en effet omniprésente. Mais je n'arrive décidément pas à trouver de points communs entre ces deux films... L'un est parfaitement maîtrisé par Christophe Honoré et se révèle être un vibrant hommage à la Nouvelle Vague, l'autre est plat et consensuel, sans aucune marque de génie !

Orane a dit…

Je ne suis pas d'accord avec toi. moi "Paris", j'ai beaucoup aimé. L'un des plus drôle de Klapish mais aussi l'un des plus dramatique. Quelques dialogues (et monologues) savoureux.
Les acteurs sont remarquables, Binoche et Duris en tête.
Je ne dis pas dommage. le film est très loin d'être glauque. courez le voir!!

Anonyme a dit…

Effectivement très bonne critique, mais moins poétique que la mienne ;)

les tamaris a dit…

suis plutôt d'accord avec ton analyse du film

je crois qu'il s'est laissé bouffer par son ambition de filmer tout paris, il a oublié d'équilibrer son scénario...

C. a dit…

bonjour, antoine
Pris la liberté de copier ce texte sur ce blog
http://librairielorielle.blogspot.com/2008/03/rponse-nicolas.html

si tu veux une invitation pour y repondre, envoie moi un mail
cordialement.