16 janvier 2011

De mon dégoût pour Twitter

 Peter Davies

Je n'aime pas Twitter. De tous les moyens d'expression à la disposition des internautes, il est à mon avis le moins fréquentable, le moins recommandable. Il faut fuir Twitter et ce qu'il représente. Il incarne la défaite de la pensée, la victoire du marketing, le naufrage de l'argumentation. Il n'est qu'un vulgaire outil de communication supplémentaire, un flux incessant de nouvelles à l'effrayante vacuité. Il propose ni plus, ni moins la diffusion de slogans, d'aphorismes parfois bien pensés mais totalement dépourvus d'intérêt. Comment peut-on réduire des idées à 140 caractères ? Twitter est le syndrome d'une société de l'immédiateté, une société qui ne prend plus la peine de se concentrer, de réfléchir, d'argumenter, une société qui veut toujours plus de bruit, toujours plus d'écho, toujours plus de "buzz" mais qui ne prend plus la peine d'analyser, de prendre du recul, une société noyée sous l'information, incapable de faire le tri. La sentence en 140 caractères est impitoyable, implacable. Impossible de réagir, de commenter, de s'opposer. Il n'est pas étonnant que les hommes politiques se soient empresser de créer un compte sur le site communautaire tant leur démarche actuelle est en parfaite adéquation avec les fondements de Twitter. Il n'est pas étonnant que l'essentiel des utilisateurs soit des communicants avides de nouvelles formes de pénétration des esprits. Twitter met toutes les informations (et quelles informations ?!) au même niveau, l'essentiel n'étant pas d'être conscient mais au courant, l'indispensable n'étant pas d'être concerné mais avisé. Twitter marque la victoire du paraître. Sous des dehors complexes, derrière une interface rebutante, le site n'est en fait que le VDM d'une petite communauté prétentieuse centrée sur elle-même persuadée qu'elle va changer la face du monde à l'aide de mots d'esprit bien tournés. Cela fait plusieurs années que je fuis Twitter et ce n'est pas 2011 qui me verra créer un compte.

25 commentaires:

Zone franche a dit…

Tout cela est vrai.
Mais alors c'est quoi le succès de cette entreprise qui n'arrête pas de grimper en valorisation, qui attire les investisseurs ? Et qui attire autant de monde ?
Cela vaut la peine d'aller plus loin et de comprendre quels usages les gens trouvent à un tel truc...
Et là on découvre des choses...
Au plaisir d'en parler..pas sur twitter si je comprend bien.

Antoine a dit…

La discussion sur Twitter risque d'être un peu limitée, encore moins de caractères que sur un SMS ! ;)

Je pense que je réponds à tes questions dans mon article en pointant du doigt l'une des plaies de la société actuelle : l'immédiateté ! Une nouvelle en chasse une autre, plus personne ne prend le temps de se poser et de réfléchir, il faut que tout aille vite, toujours plus vite ! Il fut un temps où les lecteurs de ce blog me reprochaient d'écrire des articles trop longs, comme si l'internaute était un poisson rouge avec un temps de concentration de 2 minutes, comme un zappeur s'abrutissant devant la télévision ! Twitter est l'outil idéal pour n'importe quel citadin jeune et dynamique et c'est bien ce que je lui reproche : favoriser un flux d'informations permanent, sans appareil critique et sans aucun tri ! Ce qui attire les investisseurs et les internautes (communauté limitée aux CSP+ urbains pour le cas de Twitter d'où d'ailleurs l'intérêt des marques) n'est pas fondamentalement bon ! ;)

Anonyme a dit…

Au contraire, la limite de 140 caractères oblige à être clair et conçis dans ses arguments et explications. On ne tourne pas autour du pot, on dit directement ce qu'on pense. On peut dire des choses en 140 caractères contrairement à ce que tu penses. Et Twitter est aussi un moyen d'accès à la connaissance, tu rencontres, tu discutes avec des personnes avec qui tu n'aurai jamais pu/voulu avoir de contact dans la vie réel.

Antoine a dit…

Oui, c'est bien ce que je dis, réduire toute explication sous forme de slogans, de petites citations ! Le "Cogito ergo sum" de Descartes sans les 200 autres pages du Discours de la méthode ou "L'enfer c'est les autres" de Sartre sans le reste du texte de Huis Clos ! La langue française est belle, utilisons-la, déployons-la sur plus de deux lignes à la suite !
Et l'argument de la rencontre marche autant avec un blog classique, Facebook ou Meetic, ce n'est pas une particularité de Twitter mais du nouveau type de relations qui se créent grâce à (ou à cause de) internet !

Bidibulina a dit…

La brièveté n'est pas un obstacle à la beauté. J'en veux pour preuve les haikus...

Georg-Friedrich a dit…

Ca y est! tu as retrouvé ton verbe et ta verve... Mais en même temps, je ne peux m'empêcher de sourire car tu as eu ta période poisson rouge toi aussi quand tu me reprochais (dois-je parler au passé?)l'excessive longueur de mes articles... Il semblerait que mon billet sur Sarrasine, malgré le Pannini et un échange "gîte et couvert contre commentaire", ait eu raison de tes forces...

Antoine a dit…

Bidibulina, l'argument du haïku me plait beaucoup mais es-tu sûr qu'il y ait une once de poésie sur Twitter ? :)

Et GF il y a un juste milieu entre 140 caractères et 14000 caractères, disons 1400, ce qui doit être plus ou moins la longueur de mon article ! ;)

Monsieur Zubial a dit…

N'est-ce pas trop facile de critiquer Twitter ?

Vouloir faire long et abuser de figures de styles parfois pédantes pour enrober une pensée que l'on aurait préférée concise ?

Loin des 140 caractère se cache une forêt de liens souvzent instructif.

J'ajouterais que conscientiser à tout prix est tout aussi dangereux. L'humour, la dérision tout cela à court sur Twitter et est tout aussi intéressant si ce n'est déstressant.

Bidibulina a dit…

Twitter, c'est comme un ensemble de bulles qui s'entrecroisent, il y a du mauvais, du narcissisme, des dogmes, des esprits fermés ou creux, mais il y a aussi des liens, oui, de l'info à disposition, des découvertes, de l'entraide. Ce que tu trouves dans la blogosphère se retrouve sur Twitter, des passionnés d'un sujet ou d'un autre, des exhibitionnistes et des gens qui comme moi, qui viennent confronter leur petite bulle à celle des autres, voir si elles peuvent se rejoindre l'espace d'une soirée ou se fondre l'une dans l'autre une fois pour toutes. Il y a de la poésie, oui, de la poésie en forme de poésie, écrite sciemment comme telle, et de la poésie dans les réflexions de certains, que ce soit dans le fond ou dans la forme. C'est un peu élitiste, oui, probablement, on y trouve beaucoup de diplômés ou d'autoditactes cultivés, de geeks, puisque le mot est à la mode et ceux-ci restent dans leurs bulles, les bulles des "autres" (les ados adeptes de skyblogs, les désespérés venus chercher l'âme sœur...) n'y faisant que des incursions involontaires sous forme de RT pour y être raillées. Pour moi qui bosse en freelance à la maison, je trouve sur Twitter des collègues de pause café, des gens à même de répondre à mes questions les plus diverses, professionnelles ou personnelles, et des potes pour tailler le bout de gras et refaire le monde, tout en échangeant des liens vers le site de Bertha, la lanceuse de nains obèse et hermaphrodite.
Comme partout, en somme, tu y trouves ce que tu y apportes.

Antoine a dit…

Il est facile de critiquer Twitter mais cela est tellement efficace (cet article a déjà été lu presque 300 fois) que ça en devient profondément jouissif ! :)

Concernant les liens, il y a une question que je me pose : combien d'heures compte la journée d'un twittos ? Je ne vois pas comment un individu normalement constitué (avec une vie hors de l'écran, des passions IRL) peut s'intéresser au flux incessant de tweets à partir du moment où il suit plus de 50 personnes ? Le temps étant incompressible, n'est-il pas plus intelligent de lire 10 articles de fond dénichés sur la toile (sur mon blog par exemple) que s'infliger les "gazouillis" de centaines de gus twittant tout et n'importe quoi ?

C'est de la profusion que nait ma gêne, mon embarras face à Twitter...

Bidibulina a dit…

On fait les deux. Au milieu du flot de gazouillis, comme tu dis, et bien on picore, voilà tout !

Ulan a dit…

Je suis arrivé sur cet article, que j'ai lu, via un lien posté sur twitter...

Anonyme a dit…

Rien n'est "infligé" ou subit sur Twitter dans la mesure où l'on choisit les personnes que l'on souhaite suivre ainsi que leur nombre. Le flux d'informations est complètement construit puis géré par l'utilisateur.

Formidable outils qu'est Twitter qu'en on est fait une utilisation réfléchie.

Cela étant dit, le marteau est également un formidable outils pour planter des clous.

Si l'on en connaît pas l'usage et qu'on en fait une critique au sujet de sa capacité à visser (des vis), forcément, le pauvre marteau devient l'outils le moins utilisable, voire le plus inutile. C'est donc la défaite de l'astucieux, la victoire de l'ignorant… en bref, le naufrage du bricolage.

Antoine a dit…

Je ne sais pas s'il y a de la poésie sur Twitter mais il y a des champions de la métaphore !^^

Anonyme a dit…

Bravo pour ton article Antoine. Je suis assez sidéré de voir ces anonymes défendre avec autant de hargne un outil web.

Antoine n'aime pas Twitter et il sait expliquer pourquoi. C'est tout à son honneur. Ses propos vous font peut-être trop réaliser à quel point vous gâchez vos existences sur ce site dont vous êtes les pantins.

Comme dit plus haut, sur Twitter, on trouve beaucoup de gens affalées sur leurs chaises en train de critiquer les autres (et je vais pas tarder à m'en prendre plein la tronche, c'est sûr !) et "refaire le monde". Pendant ce temps, les gens dehors font le monde ;-)

Antoine a dit…

Merci Anonyme de venir à ma défense !

Pour rebondir sur tes propos, j'aimerais évoquer un constat fait sur twitter ce week-end : il y a un nombre incroyable de twittos qui se glorifient de la révolte du Jasmin, clamant haut et fort que la réussite est due à l'influence de Twitter sur l'action collective ! Or je reste persuadé que si les tunisiens ont obtenu le départ de Ben Ali, c'est avant tout grâce à leur action (pas forcément pacifique) dans la rue et leur (omni)présence physique ! ;)

Monsieur Zubial a dit…

Pour Anonyme et Antoine à propos des deux précédents commentaires :

Si vous utilisiez ce site à bon escient et en suivant les bonnes personnes vous verrez que peu de monde c'est "glorifié" de l'influence des médias 2.0 sur cette révolution. Ne pas confondre "les médias" et "les utilisateurs de twitter".

Quand à la remarque idiot de "ceux qui font le monde" j'ai envie de répondre par mon exemple personnel : Je suis très actif dans ma vie de tout les jours, je cumule ma vie d'étudiant, une création d'entreprise et un job étudiant, je suis un utilisateur quotidien de twitter qui permet de communiquer sur mes activités de blogueur, mes articles ainsi que me renseigner sur l'actualité.

J'en connais peu affalés sur leurs chaises comme vous dites. Et je préfère encore ne rien faire et critiquer que créer des choses en suivant la foule.. A bon entendeur.

Anonyme a dit…

En voila un qui s'est senti blessé dans son amour propre et qui en arrive immédiatement à la réponse des faibles : l'insulte. A bon entendeur.

Monsieur Zubial a dit…

Je ne t'insultes pas toi, ton avis te regardes, ton ton aggressif dans le précédent commentaire aussi était insultant.

J'ai trouvé ton commentaire faible en discernement.

Bref.

Je ne me sens pas faire parti des faibles ni des forts des ailleurs et mon amour propre va très bien je te remercie de t'en inquiéter.

Antoine a dit…

Le plaisir intense des commentaires d'articles de blog qui tournent au pugilat c'est quelque chose que les utilisateurs de Twitter ne peuvent pas connaitre et c'est bien dommage ! ;)

Anonyme a dit…

Par contre, sur Twitter il est possible de commentaire les deux messages ci-dessus avec ceci :

LOL #p0wned #tasvucommeilaprischer #heinzaza

Georg-Friedrich a dit…

Quel succès ma parole!!! Quel plaisir de te voir rendre coup sur coup! Quel sens de l'estocade! Tu as mis le coup de pied dans la fourmilière! C'est un chouette départ en fanfare pour ton blog! Il n'y a rien dans tout ce que tu dis, y compris dans les commentaires, qui sont l'occasion d'affiner ta pensée, avec quoi je ne suis pas d'accord! Te voilà manifestement très inspiré!!! Pas comme moi en ce moment!

Anonyme a dit…

Bonjour. J'avais un compte Twitter il y a quelque temps et je l'ai clôturé. Non pas parce que Twitter me dégoutait mais parce que Twitter laisse des traces sur la toile et cela me gêne. Mise à part cela, je trouve que c'est un bon outil. Pour des peuples dans des pays où la liberté d'expression n'est pas " légale ", Twitter a été une révolution. Je pense à mes amis de Chine, qui utilisent Twitter, la seule plateforme non contrôlée par la censure. C'est vrai, je dois admettre que l'on dit plus de choses en 140 caractères chinois qu'en 140 lettres romanes, espaces inclus.
La toile est riche, et on y trouve de tout. Du buzz aux articles de fond. Et on a le Twitter que l'on veut. Chacun a le droit de l'utiliser ou non. D'ailleurs faut-il avoir le temps pour cela.
Je vous souhaite une bonne journée. À vous lire prochainement.

Joséphine a dit…

Pour ma part, je suis plutôt d'accord avec cette idée que l'immédiateté a remplacé la réflexion...
Ce qui m'étonne, c'est que cette réflexion s'arrête à Twitter, comme si c'était le seul reflet de nos vies passées dans l'urgence... (mais de quoi?)
Les phrases suivantes peuvent s'appliquer à de nombreux réseaux sociaux en ligne... dont un relativement connu dont je ne citerai pas le nom...
"(Twitter) marque la victoire du paraître."
"Il incarne la défaite de la pensée, la victoire du marketing, le naufrage de l'argumentation".
"Il n'est qu'un vulgaire outil de communication supplémentaire, un flux incessant de nouvelles à l'effrayante vacuité".
...

Antoine a dit…

Je ne défends pas Facebook, bien au contraire, mais je reste convaincu que les travers que je dénonce atteignent leur paroxysme sur Twitter ! Du point de vue de l'interaction, Facebook permet davantage le dialogue, l'échange et donc la réflexion que Twitter et ce même si ce n'est pas l'usage originel du site ! Plus généralement, il n'y a aucune prétention de faire partie d'une élite "au courant" sur Facebook et par conséquent, je ne peux condamner ses utilisateurs sur les mêmes motifs que les twittos !