21 mars 2008

Ebauche d'un portrait

Il y a une semaine exactement, je découvrais Jean-Luc Lagarce avec sa pièce Juste la fin du monde jouée à la Comédie Française. J'ai immédiatement accroché à son théâtre, un théâtre dur, sans concession mais néanmoins émouvant et plein d'humanité. C'est un théâtre qui me parle, un théâtre que j'aime et qui me touche. En lisant mon Télérama Sortir, je suis donc tombé sur la pièce Ebauche d'un portrait jouée par Laurent Poitrenaux au Théâtre Ouvert. Celui-ci se glisse dans la peau de Jean-Luc Lagarce pour nous jouer certains passages extraits de son journal intime. C'est génial ! Caustique et plein d'autodérision, le journal nous éclaire sur la personnalité de Lagarce, un homme dont je me sens proche. Un lent cheminement vers la mort joué avec relief et talent par Laurent Poitrenaux et mis en scène de manière intelligente par François Berreur. Le seul fil conducteur est le temps qui passe et qui rapproche chaque jour un peu plus le protagoniste d'une mort attendue. Mais le texte reste drôle, toujours drôle même dans ces moments les plus dramatiques, même si la mort (des autres et de soi) est omniprésente. On sent que derrière ses phrases balancées nonchalamment, il y a un esprit acéré, torturé par la maladie qui le ronge. Il aborde sa vie professionnelle, amoureuse, sentimentale, familiale avec dignité et humour (en y adjoignant, avec une pointe d'acrimonie, l'adjectif "nul"), un humour qui dissimule à peine sa tristesse suicidaire et le mal-être qu'il porte en permanence avec lui, de Paris à Besançon en passant par tous les pays dans lesquels il voyagea. Une prétention ironique qui rappelle un peu la mienne et qui dissimule un mal plus profond. Sa manière de s'adresser au public à travers le temps, de glisser des petits mots d'esprits intemporels et des critiques de la vie culturelle des années 80 rendent la pièce profondément vivante. Un final émouvant qui permet d'avoir un bref aperçu des goûts de Jean-Luc Lagarce. Et ma foi, on partage sensiblement les mêmes goûts culturels. Peut-être qu'un jour mon blog sera joué sur scène ?

Une pièce vibrante, émouvante qui apporte un plus indéniable à son œuvre-phare adaptée au Français.