Il y a eu une coupure, un schisme dans ma vie. Il y a bientôt quatre ans, j'ai quitté Reims, quitté mes parents, quitté ma famille pour vivre seul en banlieue puis à Paris. J'ai souvent l'impression de vivre une deuxième vie, une nouvelle vie. J'ai effacé tout ce qu'il y avait avant, avant mes 18 ans, avant mon bac, avant mon exode pour la capitale. Je ne me souviens quasiment de rien. Les voyages que j'ai pu faire avec mes parents, les films que j'ai pu voir, les livres que j'ai pu lire, tout est oublié, enfoui dans un coin de ma mémoire. Je revis certains moments par procuration, au travers de photos, d'événements relatés en famille, ces petits riens qui font la « mythologie » d'une famille, qui la soudent sans que les gens extérieurs n'y comprennent rien. Finalement, les photos sont la béquille de ma mémoire. Des souvenirs à moi, je n'en ai plus.
Depuis presque quatre ans, je me suis reconstruit une culture cinématographique, littéraire, artistique impressionnante. Une construction presque ex-nihilo. Mes parents m'ont donné les outils et aujourd'hui j'en use abondamment pour parfaire mes connaissances. J'ai revu des films dont j'avais tout oublié, j'ai relu des livres dont je ne me souvenais de rien, j'ai redécouvert des artistes dont le nom ne m'était plus familier. J'ai fait de la place dans ma mémoire pour pouvoir accueillir les réalisateurs, les acteurs, les metteurs en scène, les comédiens, les auteurs, les peintres, les sculpteurs, les créateurs dont les oeuvres ont rythmé mon quotidien ces quatre dernières années. Par conséquent, j'oublie chaque jour un peu plus les gens que j'ai pu côtoyé dans mon enfance. Les noms s'effacent, les visages s'estompent. Sur Copains d'avant, sur Facebook, des bribes de vie ressurgissent mais je n'arrive plus à les assembler. Tout me paraît si loin, tellement loin. Mon cerveau me semble anesthésié, endormi, impuissant.Je me souviens de noms : les filles dont j'étais amoureux, les garçons avec qui je jouais au foot, les profs que j'aimais bien, ceux que je n'aimais pas... Mais je suis sûr que j'en oublie. Tout est flou, fragmentaire, fragmenté. Des phrases anodines reviennent parfois, cinglantes, sans concessions. Des séquences sans importance, des passages de ma vie qui m'ont meurtris aussi parfois. Mais finalement, tout cela forme un amas confus dont je suis incapable de trouver un sens. Je me suis affranchi du poids de mon passé mais cette libération me fait peur. Peur de ce qui vient après, de ce qui vient maintenant. Je ne veux pas oublier, je ne veux plus oublier. Je ne veux pas faire une croix sur mon passé. Même si les souvenirs alourdissent la mémoire, je veux aller de l'avant en n'oubliant rien ni personne.
6 commentaires:
Moi c'est Victor, je suis ton frére. On joué au playmobile et au lego ensemble autrefois. Un peu au foot sur la plage. une fois je me souvient tu m'avais mi une baffe parse que j'avai dit a Maman que tu t'etais acheté un baladeur casssete. Tu devais avoir 13 ou 14 ans à l'epoque. Ne m'oublis pas Stp.
Ah ben tu vois, cet épisode funeste, je l'avais oublié !^^
Mais tu es qui déjà ? :D
Au début, en lisant ton post, je me disais : "Mais c'est dramatique, comment peut-on oublier son passé, n'avoir plus aucun souvenir?". Puis, en lisant les commentaires, je me suis dit que si tu passais ton temps à foutre des baffes à une créature plus faible que toi, c'était normal après tout que tu occultes ton passé...
Prendre de l'Altitude donne parfois le Vertige...c'est normal, puis vous aurez l'Ivresse des Cîmes...
magnifique. la mémoire nous trahit rapidement, malgré notre jeune âge. faut pas demander quand on aura accompli plus de choses encore. enfin heureusement il reste les photos pour se remémorer de la vie qu'on a eue. sans ça, perso, tout s'effacerait !
Ro tu m'as quand même pas oublié? *fait un grand sourire*
Moi j'ai une annecdote sur une magnifique paire de Boots alors que y'avait quoi... 1cm de neige dans les rues de Reims ^^
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